[Chronique] Des sorciers et des hommes, de Thomas Geha

Des Sorciers et des hommes
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« Bienvenu à vous, voyageurs. Vous n’êtes ni d’ici ni d’ailleurs. Ici vous n’êtes pas. Rien ne vous appartient, pas même vos motivations, vos buts. Ici le vent vous dépouille, le sel vous ronge, la pluie vous dissout. Ne croyez pas que votre âme sera épargnée. Ou votre cœur. Ce qui vole se pose, ce qui bat s’arrête. Mangez le silence, mâchez-le. Déjà, vous n’entendez plus ma voix. Il vous reste seulement le choix. »


 
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Des sorciers et des hommes
Auteur :
Thomas Geha
Éditeur : Critic
Genre : Fantasy
Date de parution :
24 mai 2018
Nombre de pages : 318
Prix : 19 €
Synopsis
Sur la grande île de Colme, quand on sait mettre toute morale de côté, la vie offre de nombreuses opportunités. Boire, voler, rudoyer ou tuer, tel est le quotidien de Hent Guer, un guerrier redoutable, et de Pic Caram, un sorcier aux rubans. Tous deux écument routes et cités à la recherche de proies faciles. Toutefois, leurs plans se trouvent contrariés lorsqu’un matin de gueule de bois, Hent constate, impuissant, la disparition de Pic. Sur la grande île de Colme comme ailleurs, les talents d’un sorcier aux rubans attirent bien des convoitises ! Pour le mercenaire, pas question d’abandonner son partenaire de crime : spolier son prochain est beaucoup plus drôle avec l’aide d’un sorcier à la morale légère. Voici donc le récit des aventures de Hent Guer et Pic Caram, et les mésaventures de ceux qui ont la malchance de croiser leur route !

MON avis

Des Sorciers et des hommes est un récit construit sous formes de nouvelles possédant une trame chronologique. Les cinq premières nouvelles mettent en scène les aventures du duo de personnages principaux : Hent Guer et Pic Caram. Les deux personnages font figure d’antihéros comme on en voit peu, ils sèment le trouble sur leur passage sans jamais ressentir aucun remord. Dans ces premières nouvelles, on découvre ainsi des histoires indépendantes concernant les deux personnages, on apprend les circonstances de leur rencontre, certains éléments du passé de Pic Caram et on suit les personnages dans leur errance de villes en villes en quête de fortune. La dernière nouvelle – et la plus longue en nombre de pages – est construite de manière totalement différente. Hent Guer et Pic Caram ont détruit la vie de nombreux personnages et vont devoir répondre de leurs actes. Cette nouvelle met finalement en scène toutes les victimes des deux anti-héros dans leur quête de vengeance et fait de cette manière écho à toutes les nouvelles précédentes. 

J’ai mis un peu de temps avant d’apprécier complètement cette lecture que j’ai trouvée déstabilisante d’un premier abord. En effet, les deux personnages principaux sont exécrables, c’est bien là l’un des intérêts de ce roman, mais c’est compliqué de se plonger dans une lecture dans laquelle on est totalement révulsé par les personnages. Il faut dire que Hent Guer et Pic Caram n’ont quasiment aucune morale, ils ne respectent personnes et encore moins les femmes. Ils commettent ainsi pratiquement tous les délits possibles et inimaginables (meurtres, vols, mensonges et manigances…) sans jamais ressentir aucun scrupule. Du moins, c’est le cas dans les premières nouvelles, puisque dans le cas de Pic Caram, on s’aperçoit que le personnage est un peu plus nuancé que ça… Néanmoins, on ne peut pas se projeter dans ces personnages même si après une ou deux nouvelles, la curiosité finit par dépasser la répulsion et ce, sûrement grâce à la plume très vive et dynamique de Thomas Geha et à l’humour qui se dégage de cet univers sombre. Au final, on se prend au jeu et on attend avec intérêt de savoir quels seront les nouvelles aventures des deux héros et la manière dont ils vont s’y prendre pour semer la terreur autour d’eux, en attendant quand même toujours que quelqu’un finisse un jour par se venger… Et en sens la dernière nouvelle est jubilatoire ! 

Cette dernière nouvelle prend totalement le contre-pied des précédentes et offre un dénouement brillant à ce récit. On retrouve avec beaucoup de plaisir les personnages des nouvelles précédentes. On apprend ainsi ce qu’ils sont devenus ce qui offre une continuité à toutes les nouvelles du récit et offre un beau développement aux personnages secondaires. D’ailleurs cette dernière partie met en avant des personnages féminins fortes et indépendantes comme on les aime et c’est agréable de voir ainsi l’auteur casser les codes du genre de la sword and sorcery. Cette dernière nouvelle permet également de développer l’univers créé, notamment d’un point de vue géopolitique, univers d’ailleurs très agréablement dépaysant et qui semble n’avoir révélé que peu de choses ! 


Conclusion


Des Sorciers et des hommes est un récit très original sur sa forme de par son format composé de nouvelles. Les premières nouvelles suivent Hent Guer et Pic Caram, deux anti-héros qu’il est déstabilisant de suivre au départ tant ils sont dénués de morale ! Finalement grâce à l’humour et à l’écriture très dynamique de Thomas Geha, on se prend au jeu et on finit par suivre avec beaucoup de curiosité leurs aventures. La dernière nouvelle prend le contre-pied des précédentes en créant un lien entre toutes les nouvelles tel un puzzle. Cette dernière nouvelle nous offre de nouveaux points de vue et conclut brillamment le récit !

tb lecture

12 réflexions sur “[Chronique] Des sorciers et des hommes, de Thomas Geha

  1. Lisibles Songes 10 juin 2020 / 15 h 59 min

    Ça donne envie !! Je m’apprête bientôt à lire L’empire du Leopard de ce même éditeur 🙏🏻

    Aimé par 2 personnes

  2. Baroona 10 juin 2020 / 18 h 01 min

    Étonnamment je me retrouve bien dans ta chronique, sauf qu’à mon grand regret je n’ai jamais réussi à dépasser ce sentiment d’un certain déplaisir à suivre des vrais méchants et je n’ai pas eu de jubilation à suivre la vengeance finale – ça m’a mis autant mal à l’aise. Mais ça reste un livre bien construit et cherchant à proposer quelque chose de différent, c’est indéniable et je respecte ça. ^^

    Aimé par 1 personne

    • Sometimes a book 10 juin 2020 / 20 h 25 min

      Oui je comprends totalement qu’on puisse ne pas avoir ce déclic et passer à côté du roman !

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  3. OmbreBones 10 juin 2020 / 18 h 59 min

    Perso j’avais été déçue par ce texte qu’on vend comme de la dark fantasy alors qu’il y a une happy end moralisatrice à la fin qui a gâché tout mon plaisir :/

    Aimé par 1 personne

    • Sometimes a book 10 juin 2020 / 20 h 25 min

      C’est bizarre, j’ai jamais vu personne qualifier ce roman de dark fantasy, partout j’ai vu que c’était du sword & sorcery… Enfin c’est dommage du coup :/

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    • Thomas Geha 10 juin 2020 / 20 h 34 min

      Je me permets de répondre en toute bonne foi et sans recherche de polémique à ça si vous voulez bien : Il n’y a aucune morale dans ce livre et il n’est pas – à mon sens – moralisateur. Il montre juste, de façon nette, qu’une pièce peut avoir deux facettes. Un jour c’est pile, et tout va bien dans le meilleur des mondes, et un jour c’est face et on est rattrapé par la patrouille. Et même celles et ceux qui semblent « gagner » à la fin ne gagnent pas dans des conditions morales très nettes (parce que, notamment, ce qui les guide, la vengeance, n’a rien de particulièrement moral), d’autant moins qu’il semble y avoir une manipulation en arrière-plan. Qui plus est, le seul personnage réellement guidé par une morale assez forte ne s’en sort pas très bien – euphémisme. Pour moi, il n’y a de happy end pour personne. C’est en tout cas l’idée que j’ai essayé de diffuser. Je comprends aussi qu’on puisse ne pas adhérer à ma logique.
      Merci en tout cas à toutes et tous pour vos critiques enthousiastes ou moins. C’est toujours très plaisant de voir mes romans discutés !
      (J’espère que vous ne m’en voudrez pas de cette intrusion)

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      • OmbreBones 10 juin 2020 / 21 h 59 min

        C’est comme ça qu’on me l’a présenté en salon à sa sortie, peut être que ça a été nuancé par la suite. Tant mieux si c’est le cas !
        Et aucun souci l’auteur a le droit de s’exprimer pour défendre son œuvre, moi je l’ai ressentie de cette manière parce qu’elle m’a été présentée d’une mauvaise façon du coup j’en attendais autre chose tout simplement. Ce n’est pas un mauvais livre, il ne me convenait tout simplement pas en l’état parce qu’on a chacun nos sensibilités. Ma lecture remonte à trop loin pour pouvoir en débattre efficacement.

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  4. cleop7 10 juin 2020 / 19 h 24 min

    J’ai aussi tenté cette lecture que j’avais emprunté à la médiathèque mais je n’ai pas poursuivi longtemps, cette violence gratuite, notamment envers les femmes… Ce n’était pas le moment pour moi de lire ce genre, je n’avais pas envie de suivre de tels personnages. Ton éclairage sur la dernière partie peut réviser mon jugement, je retenterais peut-être…

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    • Sometimes a book 10 juin 2020 / 20 h 27 min

      Ah oui je comprends, moi aussi le début me rebutait pour ça, mais j’ai finalement bien fait de persévérer. Ça pourrait valoir le coup de réessayer en étant préparer à affronter ce genre de personnages !

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