[Chronique] Le Regard, de Ken Liu

Le Regard

«Le petit nombre de personnes au courant des implants oculaires l’étonne. Les yeux ont un caractère si vulnérable, si essentiel à la perception du monde et de soi qu’on devient protecteur à leur égard : on hésite à les violer. Les lois sur les altérations oculaires sont les plus sévères. Avec le temps, les gens confondent « interdit » et « impossible ». »


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Le Regard
Auteur :
Ken Liu
Traduction : Pierre-Paul Durastanti
Illustration : Aurélien Police
Éditeur :  Le Belial’ – Collection Une heure lumière
Genre : ThrillerScience-fiction
Date de parution  : 15 juin 2017
Nombre de pages : 93
Prix : 8,90 €
 
Synopsis
DEMAIN…
Dans son registre, celui de l’investigation, Ruth Law est la meilleure. D’abord parce qu’elle est une femme, et que dans ce genre de boulot, on se méfie peu des femmes. Parce qu’elle ne lâche rien, non plus, ne laisse aucune place au hasard. Enfin, parce qu’elle est augmentée. De manière extrême et totalement illégale. Et tant pis pour sa santé, dont elle se moque dans les grandes largeurs — condamnée qu’elle est à se faire manipuler par son Régulateur, ce truc en elle qui gère l’ensemble de ses émotions, filtre ce qu’elle éprouve, lui assure des idées claires en toute circonstance. Et surtout lui évite de trop penser. À son ancienne vie… Celle d’avant le drame…
Et quand la mère d’une jeune femme massacrée, énuclée, la contacte afin de relancer une enquête au point mort, Ruth sent confusément que c’est peut-être là l’occasion de tout remettre à plat. Repartir à zéro. Mais il faudra pour cela payer le prix.
Le prix de la vérité libérée de tout filtre, tout artifice. Tout regard…
 

MON avis

Après la lecture coup de poing de L’homme qui mit fin à l’histoire, j’ai continué ma découverte de Ken Liu avec Le Regard, autre novella publiée dans l’excellente collection Une heure lumière des éditions Le Bélial’, que j’ai lue en lecture commune avec tampopo24 du blog Les blablas de Tachan

Avec Le Regard, Ken Liu nous emmène dans un récit beaucoup plus classique, mais extrêmement efficace. Dès les premières, le ton est donné avec la description du meurtre d’une prostituée. Les chapitres alterneront ensuite entre le point de vue de la détective privée qui enquête sur ce meurtre et celui du tueur lui-même. On retrouve ainsi le schéma classique d’un roman policier comme j’ai pu en lire beaucoup d’autres, même c’est particulièrement intéressant d’avoir ici le point de vue du tueur, ce qui n’est pas si courant. Néanmoins, cette novella diffère des autres récits policiers classiques grâce à son aspect futuriste et aux nouvelles technologies utilisées dans le récit. Que ce soit les méthodes d’investigation ou le meurtre en lui-même, tout est remis en perspective grâce ces nouvelles technologies qui sont décrites de manière très précise et semblent extrêmement réalistes. Ken Liu réussi à nous offrir un récit glaçant de réalisme et c’est une qualité qui est pour moi essentielle à la lecture d’un thriller.

La plume de Ken Liu est également extrêmement efficace. Elle est simple, mais incisive et extrêmement visuelle. Aucun effort particulier n’est nécessaire pour visualiser les scènes de cette novella dans laquelle le regard a justement une grande importance. Ken Liu réussit d’ailleurs extrêmement bien à compenser le manque de suspense dû à la connaissance de l’identité du tueur dès le premier chapitre par un récit au rythme haletant qui devient bien vite addictif. Il offre plusieurs scènes chocs (dont la première) pour dynamiser le récit et le rendre percutant et ce rythme fonctionne extrêmement bien. Cependant, dès le milieu de la novella, j’ai senti venir une frustration comprenant que les choses allaient se dénouer bien trop vite. Et c’est bien ce qui s’est passé, puisque l’enquêtrice semble tout d’un coup trouver la résolution comme un cheveux sur la soupe et la fin en devient extrêmement précipitée. La novella se termine ainsi de manière abrupte alors que l’auteur aurait pu aller encore plus loin dans l’intrigue et dans sa réflexion. Le récit met en avant les dérives d’une société ultra-technologique sous un prisme assez intéressant et original ainsi qu’une réflexion sur le libre-arbitre, qui auraient pu être poussées encore au-delà. L’enquête et ses conséquences auraient également pu faire l’objet d’un plus grand développement et la résolution être ainsi amenée plus finement. Finalement, j’ai eu un goût d’inachevé en terminant cette novella dont le sujet et le rythme étaient pourtant extrêmement bien maîtrisés et qui aurait pu être un excellent point de départ pour un roman au format un peu plus long. 


Conclusion


Le Regard est un court thriller d’anticipation de 94 pages dont le récit alterne entre le point de vue d’une détective privée et de celui d’un tueur en série. L’enquête en elle-même est très classique, mais le cadre futuriste et les nouvelles technologies développés par Ken Liu sont très bien pensés et rendent le récit glaçant de réalisme. Le rythme rapide et la tension constante qui anime les pages rendent la novella très addictive compensant très bien le manque de suspense, mais le tout aurait mérité d’être un peu plus étoffé. L’enquête se résout de manière extrêmement rapide sans que ses conséquences ne soient jamais abordées. La dérives liées à ce monde ultra-technologique sont traitées à travers la thématique très sensible de la vision et la notion de libre-arbitre ce qui est très intéressant, mais aurait également pu être plus développé. 

Bonne lecture

D’autres avis : YuyineLes lectures du MakiBlackwolfApophisOmbrebonesBaroonaCélindanaéLutin rêveurHerbefolEn tournant les pagesAlbédoL’imaginarium électriqueUn fil à la pageAcanielLe chroniqueurLorkhanL’ours inculteL’épaule d’OrionAelinel – 

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17 réflexions sur “[Chronique] Le Regard, de Ken Liu

  1. OmbreBones 19 février 2021 / 9 h 55 min

    Merci pour le lien 🙂 je partage ton avis sur ce texte, c’était bien mais il manquait un petit quelque chose pour que ce soit excellent.

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  2. Callysse 19 février 2021 / 12 h 02 min

    Je me le note, vous m’avez suffisamment donné envie toutes les deux (et puis c’est un texte court alors pourquoi pas!)

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  3. Baroona 19 février 2021 / 12 h 41 min

    Ah, mince. C’est vrai qu’on s’installe bien dans le récit et que ça peut donner envie d’y rester plus longtemps. Moi c’est presque le contraire, j’avais été content qu’il fasse tenir une histoire complète dans une novella, alors que beaucoup auraient, avec le même point de départ, tiré à la ligne pour en faire 400 pages, sans que ça apporte vraiment plus. ^^

    Aimé par 1 personne

    • Sometimes a book 19 février 2021 / 22 h 08 min

      Ah j’aurais pas vu 400 pages non plus, mais au moins une fin un peu moins abrupte !

      J’aime

  4. Tigger Lilly 19 février 2021 / 20 h 35 min

    Oui c’est très efficace comme récit. Je l’avais cependant trouvé un peu scolaire dans sa façon de cocher toutes les cases du cyberpunk.

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  5. Light And Smell 19 février 2021 / 20 h 48 min

    Tampopo24 et toi semblez avoir sensiblement le même avis sur cette novella qui me tente bien malgré une fin quelque précipitée. C’est un peu le risque et défaut récurrent du format même si certains auteurs arrivent à mieux s’en sortir de ce côté-là…

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    • Sometimes a book 19 février 2021 / 22 h 11 min

      Oui c’est le risque et Ken Liu est vraiment fort pour le format court justement donc c’est pour ça que c’est un peu décevant venant de lui. Mais ça reste une lecture très intéressante quand même !

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